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10 juillet 2025
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4 min de lecture
Et si le confort n’était pas universel ?
À travers cette série, nous faisons escale dans différentes cultures pour comprendre ce que signifie “être bien”.
Première halte : chez nous.
Le mot “confort” évoque instantanément un univers de douceur, de chaleur, de moelleux. Mais derrière l’image du coussin bien gonflé ou du lit douillet, le confort est une construction culturelle.
Cette série d’articles propose une cartographie sensible du confort. Chaque étape nous mène dans un pays ou une culture différente pour explorer les formes multiples du bien-être : ce qu’on valorise, ce qu’on ignore, ce qu’on craint.
Nous commençons par un lieu familier : la France, où l’on découvre que le confort est aussi une affaire de maîtrise douce, de temps long, et parfois… de repli.
“Confort” vient du latin confortare, qui signifiait fortifier, encourager.
Avant le XVIIIᵉ siècle, “conforter” signifiait principalement donner du courage. À partir du XVIIIᵉ siècle il commence à désigner l’aisance physique.
Le mot a donc changé de fonction : de soutien moral, il est devenu état stable et recherché du corps et de l’environnement.
Aujourd’hui, en France, ce glissement s’exprime dans un confort sécurisant, organisé, rarement ostentatoire — mais parfois rigide.
À l’étranger, la France évoque un certain art de vivre : l’élégance du foyer, la lenteur choisie, le goût des belles choses.
Mais en France même, ce “confort” est ambivalent : on valorise le chez-soi, mais on parle aussi de la fameuse “zone de confort” avec l’idée qu’il faudrait en sortir pour évoluer.
Le confort français est-il un refuge… ou une frontière invisible qu’on hésite à franchir ?
Cette tension est forte dans notre culture. Elle oppose l’aspiration au bien-être à la peur du changement, la recherche d’équilibre à l’inertie douce.
Le confort se vit à l’intérieur, dans un espace maîtrisé, protégé du bruit, du froid, de l’imprévu. L’idée de “nid” n’est pas une métaphore, c’est un idéal partagé.
Un bon lit, une chambre silencieuse, un temps de repos sacralisé sont des éléments perçus comme fondamentaux.
L’insonorisation, le retrait, la capacité à s’isoler sont au cœur du confort tel qu’il est vécu.
Le ralentissement, les rituels quotidiens, les temps de pause non négociables (repas, lecture, etc.) font partie intégrante de la culture du confort en France.
À partir de ces piliers, on peut dessiner une grammaire française du confort :
“Repos”, “douceur”, “tranquillité”, mais aussi “sérénité”, “maîtrise”, “temps pour soi” : autant de mots qui reviennent dans les témoignages liés au bien-être domestique.
Et pourtant, certains types de confort sont moins visibles, voire absents dans l’imaginaire collectif :
Le confort, en France, est une forme de souveraineté douce : pouvoir organiser, moduler, ralentir.
Mais c’est aussi un confort qui se referme parfois sur lui-même.
Notre idéal de bien-être est souvent tourné vers le retrait maîtrisé, vers le “chez soi” protecteur. Cela peut apaiser… ou enfermer.
Prochaine escale : le Japon, où le confort se pense d’abord en creux, dans l’absence de gêne pour autrui.
Une autre carte, un autre monde.